UFAS asbl
La Présidente de l'UFAS, en sa qualité de Doyenne d'Honneur du Travail secteur social, est intervenue à la demande du Collège Royal des Elites du travail de Belgique lors du 100ème anniversaire du Bureau International du Travail
Collège Royal des Elites du travail de Belgique.
100e anniversaire du Bureau International du Travail.
24 avril 2019.
A l’occasion du 100e anniversaire du Bureau International du Travail, le Collège a souhaité s’associer aux manifestations pour célébrer cet évènement
Monsieur Luc Cortebeeck, membre de la Commission Mondiale « Future of Work » nous a présenté une synthèse de ce rapport.
Dans le contexte actuel, ce rapport nous interpelle et concrétise les constats que nous faisons toutes et tous, considérant la déstructuration des systèmes économiques qui jusque là avaient contribué au développement de nos sociétés.
De nouvelles forces transforment le monde du travail. Nous entrons dans une période de transition. Nous devons prendre sans tarder et avec lucidité des mesures pour préparer ces changements.
Ces mesures doivent répondre aux besoins pour des conditions de vie digne, pour un travail de qualité et assure une protection sociale adéquate.
Il faut aussi en finir avec toutes les discriminations, et promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes tant sur le plan du salaire qu’en matière d’accès à l’emploi et aux droits sociaux.
Les dommages créer par toutes sortes de discriminations sont déjà très visibles et, sans prendre des mesures rapidement, nous allons vivre dans un monde de plus en plus injuste et dans l’insécurité.
Certes, les progrès technologiques, le développement de l’intelligence artificielle, l’automatisation et la robotique, vont créer de nouveaux métiers. Mais ceux qui perdent leurs emplois au cours de cette période de transition, sont les moins bien préparer pour saisir de nouvelles opportunités.
Actuellement les outils, dont nous disposons ne permettent pas de savoir s’ils seront encore utiles demain. Les formations récemment acquises seront peut-être rapidement obsolètes.
Cette entrée en matière devait permettre diverses interventions. Le Président de l’Institut a souligné la volonté de cette institution de réagir face aux défis actuels et affirmé sa volonté d’associer à ses travaux, toutes les parties concernées : les administrations publiques, les syndicats, mais aussi les travailleurs, les jeunes et les étudiants. Ces questions concernent d’avenir.
Les inégalités, les injustices engendrées par le système économique et les dérives administratives devaient nécessairement nous amenés à se pencher sur la situation des femmes dans notre société.
En temps que femme et Doyenne pour le secteur Social, j’ai été sollicitée pour répondre à quelques questions issues des débats. J’étais accompagnée de Madame Simone Laeremans, Doyenne elle aussi pour le secteur industriel.
Madame Laeremans a souligné combien, malgré des améliorations, la situation des femmes reste précaire. Les inégalités salariales restent flagrantes. Des mesures de compensations sont parfois prises dans certaines entreprises, mais des conditions de réaménagement, ou de restructuration mettent fin rapidement à ces timides avancées. Manifestement les changements de mentalité sont lents et il manque toujours une vrai volonté politique.
En ce qui me concerne, j’ai une longue expérience et je dirais presque « Hélas » car nous n’avançons pas de manière significative, et les constats concernant les causes économiques, sociales et culturelles sont toujours les mêmes. Certaines études récentes considèrent que les inégalités ont augmenté ces cinq dernières années.
L’écart salarial reste un fait : 21% selon des estimations fiables. En tant qu’assistante sociale et présidente de l’Union professionnelle Francophone des Assistants Sociaux (U.F.A.S.) nous sommes informées des mécanismes parfois très subtiles qui permettent de justifier ces écarts.
Les primes de pénibilités dans certaines entreprises, ne sont pas attribuées au personnel féminin - on a oublié de faire l’évaluation de la pénibilité de leur tâches. On peut aussi évoquer tous les abus, au nom de la « flexibilité ». Souvent ce sont des postes occupés par des femmes qui sont les plus concernés.
Parmi les efforts pour amener à plus de considération en matière d’égalité entre homme et femme, on considère que d’établir un « quota » est une première étape.
Souvent cela conduit à des situations forcées, qui ne mettent pas réellement en valeurs les compétences des uns et des autres. C’est à mon sens une manière de se donner bonne conscience et faire bonne figure auprès des électrices.
Le Principe « A travail égal Salaire égal » est une revendication déjà ancienne, et pas encore réalisée.
Mais laissez-moi vous raconter brièvement ce qui m’a été dit alors que j’étais encore étudiante.
Au cours d’un exposé fait par une personne représentante d’un syndicat, que l’école sociale avait invité pour nous parler de ce combat, j’avais réagi vigoureusement au fait qu’il semblait si difficile de faire admettre l’égalité de salaire pour un même travail.
L’invitée m’a répondu en néerlandais (c’était sans doute sa langue maternelle) : « Juffrouw, u will de Maan met uw tanden beiten ».
Il y a 60 ans de cela et chaque jour il faut que je continue à m’associer à ce combat, comme s’il s’agissait d’une utopie et en quelque sorte et vouloir atteindre la lune !!!!
Les traditions culturelles ont un certain impact sur la place des femmes dans la société, mais que fait-on réellement pour reconnaître la complexité des préjugés qui justifient plus ou moins ouvertement ces inégalités.
Je terminerai en évoquant un aspect de ces injustices dont on ne souligne pas assez qu’elles concernent particulièrement la situation des femmes seules, souvent avec des enfants à charge. Nous avons constaté le nombre croissant de situations de surendettement. Pour des motifs divers, elles se voient dans l’obligation de rembourser des emprunts qu’elles n’ont pas toujours souscrits. Laissées seules, c’est à elles que les créanciers s’adressent pour le recouvrement des sommes dues, majorées d’intérêts de retard qui arrivent à des montants énormes. L’insolvabilité, malgré les mécanismes pour gérer ces situations engendre la dépendance économique et la pauvreté s’installent pour de longues années. La gestion du surendettement telle qu’en vigueur actuellement doit être reconsidérée si on veut vraiment lutter contre la pauvreté familles ayant une répercussion énorme sur l’avenir des enfants. Mais en tant que femme, assistante sociale et présidente d’une association professionnelle, je n’oublie pas, moi, les hommes qui sont dans la même situation.
Je demande que l’on reconsidère ces dispositions légales qui pérennisent la précarité au lieu de la combattre.
Les femmes aujourd’hui ont acquis des compétences professionnelles comme les hommes dans tous les secteurs des activités économiques, sociales et culturelles.
Elles occupent des postes où il devient bien difficile de justifier une inégalité de salaire. C’est à mon sens à ce niveau que nous devons porter nos revendications. Les syndicats doivent, avec acharnement, continuer le combat et nous aider ensemble à vouloir mordre la lune !!!
Pour L’IRET évènement du 24 avril 2019.
Liliane Cocozza
Doyenne d’honneur du travail
Secteur Social.